jeudi 5 février 2009

Le sud de Santiago

La nuit, dans le quartier chic de Las Condes, sur la terrasse de l'appartement commode d'Anna et Yuri, des collègues du Cosmonaute, vous êtes entourés de la mer des lumières qui va jusqu'au horizon. Là, en bas, il y a une ville de six millions d'habitants et si vous regardez vers le sud, vous voyez Providencia, où on habitera, si tout va bien, puis Nunoa et derrière des autres quartiers du sud. Plus vous allez au sud, Constanza, une chilienne, m'a dit, plus les gens sont pauvres. Les nanas viennent du sud chaque jour par métro pour promener des chiens de leur maître. Les acrobates et les jongleurs qui montrent leur art face aux masques des quatres quatres et des petits camionnettes arrêtés aux feux sont aussi de là-bas. En s'arrêtant deux minutes aux feux vous regardez leur spectacle qui vous fait toujours penser si on est vraiment tous égaux...devant les lois de la gravitation. Et puis il y a le main dans le vitre de votre voiture. Je paie à chaque fois, c'est bien mérité. Et du sud viennent aussi les vendeurs des fleurs, de l'eau, des fruits ou de la glace qui courent entre les voitures.

Chaque quartier est un peu un monde pour lui même avec ses événements, ses festivals et sa culture. Pour sortir, on ne va donc pas forcément au centre ville, on va au centre de son quartier. Cette organisation des "villes en ville" a ses avantages et ses inconvénients. Vous trouvez vite les avantages. Il n'est pas nécessaire de prendre le métro pour sortir manger ou voir une pièce de théâtre. L'inconvénient est que les gens ne savent pas forcément comment vivent leurs co-citoyens. Surtout les gens riches ne sortent pas leurs pieds riches des quartiers riches. Veronica, notre prof d'espagnol, vit à Vitacura, le quartier où on pourrait manger pas terre s'il y avait pas des chiens de rase qui s'auto-promènent. Quand j'ai dit qu'on va habiter à Bellavista, elle m'a demandé dans quelle étage se trouve notre appartement. "Troisième", j'ai dit. "Alors oublie! Il faut au moins cinquième." Mathilde, la fille qui m'a pris sous ses ailes à notre arrivé, avec son mari et sa famille y vivent et ils nous ont dit que Veronica n'a pas voulu venir les enseigner à domicile, car elle a eu peur laisser son gros quatre quatre dans la rue. J'ai répondu donc que je pense qu'il n'y a pas de soucis pour ce bâtiment, car même les gens au rez de chaussée n'ont pas des grilles sur les fenêtres, la jolie décoration de tous les fenêtres chiliennes dans tous les quartiers. J'ai ajouté que les gens laissent leurs vélos dans le cour ou même dans la cave, un truc qu'aucun vrai grenoblois aimant sa carcasse de vélo ferrait jamais. Veronica a répondu que quelqu'un le remarquerait bientôt et qu'ils voleront tous les vélos. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui confier qu'une fille de bâtiment m'a dit qu'elle laisse son vélo dans la cave depuis six ans. "Alors, ils doivent avoir des excellents gardiens", a conclu Veronika.

Quand j'ai dit à Veronika que je vais pour mon premier entretien de travail au sud de Santiago, à Puente Alto, elle n'a rien dit, mais pendant le cours suivant, elle a bien reproché au Cosmonaute qu'il m'y laisse aller. Mais là, la visite du Puente Alto était déjà derrière nous. On s'y est rendus samedi. Puente Alto est le quartier au extrême sud du Santiago au terminus du ligne de métro 4. Ce ligne passe sur la surface et on a donc pu regarder la ville changer. Vers Nunoa, les grattes-ciels étaient remplacées par des maisons colorées avec des jardins et avec des grilles indispensebles. Parfois on a passé par un quartier des maisons assez luxes, parfois des maisons plus habituels, parfois on a vu un bâtiment de quelques étages, et souvent il y avait un supermarché, un hôpital, un parking ou un autre bâtiment moche. A la fin, le métro a replongé sous la terre. Et on y était. A Puente Alto.

On est sortis sur une place ou ils étaient en train de monter le podium pour un festival. A droit, il y avait un arrêt de bus, à côté d'elle une banque et un magazine des fringues. Devant sur le trottoir, il y avait des vendeurs des cacahuètes sucrés, de l'eau et des chips. On ne s'est pas trompés de la ligne? Nous avons marché encore vers le sud et comme les numéros des maisons étaient aussi incompréhensibles que partout à Santiago, à la place d'aller vers la gauche, nous sommes partis à droite (grave erreur). Nous avons passé quelques blocs des magazines du meuble quand j'ai décidé de téléphoner. Il y avait le vendeur du bureau de tabac devant lequel je me suis mis à sortir le plan de Santiago. Son fils m'a regardé un peu amusé et un peu étonné: apparement, il n'a jamais entendu un espagnol aussi drôle. Le vendeur a voulu nous indiquer le chemin, mais on a déjà compris qu'on ne va pas dans la bonne direction.

Après mon entretien, le Cosmonaute et moi, nous sommes allés dans un bar du coin pour arroser ça d'une bière, légèrement moins cher que dans les quartiers nord. J'ai mangé un sandwich au poulet avec ma bière et on a parlé de l'association qui m'a bien plu. Les gens ont été très sympas et leur travail m'a paru importante et sensé. Vivir Libres aident des alcooliques et des toxicomanes s'en sortir. Les patients viennent de leur propre volonté, parfois avec toute la famille. Buvant notre bière, on s'étonnait: c'est ça le quartier dangereux?

Alors, vous attendez pour une petite péripétie criminelle? M'ont-ils volé mon téléphone? Mon sac? Ou au moins était-je malade à cause de mon sandwich au poulet que ma mère m'autoriserait jamais manger dans les 30 dégrées?

N'attendez pas. La fin est simple. On a pris le métro et on est repartis vers le nord.

J'ai repris le métro au sud mercredi pour aller voir Angelica qui organise des programmes de soutien pour des enfants d'un autre quartier défavorisé nommé Granja. Quand j'ai pris le contact avec Angelica, elle m'a prévenu que Granja n'a rien à avoir avec Las Condes avec ses pelouses arrosés 12 heures par jour et ses alarmes. Je l'ai assuré que je le pense bien.

Angelica est née à Granja et en ce moment, par hasard, elle vit à Puente Alto. Grâce au bourse d'étude, elle a pu faire la fac et maintenant elle essaie d'aider des enfants de son quartier. Je demande donc, quelles sont les problèmes typiques de ses enfants. A ma surprise, Angelica dit que c'est la tristesse, le sentiment d'abandone par un parent absent à cause de son incarcération ou fugue. Les drogues? La violence? La violence à l'école où Angelica intervient? Oui, il y en a, mais c'est tout à fait gérable. Dans les écoles, il y a quand même une autorité d'enseignant qui connaît souvent plusieurs générations des gens de Granja. Les gens restent sur leur place. Je demande donc les chiffres de chômage. Angelica estime qu'il a une moitié des gens qui ont un travail stable. L'autre moitié enchaîne des travaux précaires et il y en a une part qui fait des activités hors loi. Le système social est quasi inexistant, donc chacun doit se débrouiller. En rentrant je me dis que le système familial doit être assez fort et qu'il sert comme un réseau, les gens s'entretient entre eux. Malheureusement je ne peux pas vérifier cette idée auprès d'Angelica. Mais un sociologue dirait sans doutes que ce système est aussi une prévention de la criminalité. Angelica m'a décrit cette partie de la ville dans ces mots: "Ceci est la partie moche de Santiago. Ici, les gens vivent comme ils peuvent." Vivre et laisser vivre. Les gens sont pauvres, mais ils ne sont pas résignés. Et là, où il n'y a pas la résignation d'une partie importante de la population, il n'y a pas en masse la violence, l'alcoolisme, la toxicomanie et d'autres phénomènes qu'on rencontre sur les banlieuex d'Europe.

Devant un verre de jus frais, on discute aussi de mes impressions de Chili. Angelica me demande qu'est que m'a surpris au Chili. J'hésite et puis je lui dis que c'est l'occidentalisation du nord, son américanisation avec ses Starbicks et Burger Kings. Angelica, aussi bien que Paulina ou Veronica, commence à parler de la société de consommation qui a remplacé la dictature. "Après Pinochet, on a construit des parcs partout à Santiago. Mais qui y va? Regarde dimanche! Et regarde dans un centre commercial!" Cette réalité est incontestable. J'ose donc ajouter qu'on est surpris aussi par le fait que les Chiliens ne sont pas très festives, qu'ils ne se parlent pas trop, par la silence dans le métro, qu'ils ne se disent souvent pas bonjour. Angelica me dit une autre vérité: "Tu sais, nous sommes très peu productives, et on doit rester très longtemps au travail. Et du coup, les gens ne font que travailler et dormir."

En partant, nous passons autour d'une piscine et un salle de sport. Angelica y attire mon attention. Dans la salle de sport équipé par une quarantaine des vélos et autre matériel cardio, il y a un groupe des adolescents qui font du sport même s'il fait plus que 30 dégrées. "Tu vois, il n'y a personne.", dit Angelica. Je dis que sept ados en plein journée des vacances à faire du vélo, c'est plutôt énorme. Et je demande qui le paie. "L'état.", dit Angelica. L'entrée est libre. Je m'imagine une mairie dans un des quartiers de Prague faire ça. Où plutôt de construire un patinoire où les garçons dont les parents payent vont s'entraîner pour devenir, avec un peu de talent, l'élite de nation. Et je l'entends. On ne peut pas laisser les cas sociaux entrer sans payer, ils vont tout casser!

Peut être le fait que les quartiers pauvres de Santiago ne sont pas un ghetto a à avoir avec le système familial qui ne permet pas un déracinement et des phénomènes qui vont avec. Mais il y a aussi la confiance de l'autre côté.

Alors voilà. J'apprends aux petits pas comment est la vie au Chili et je vous parle de cette mozaique. Je me trompe forcément en beaucoup de choses, donc ne me prenez pas trop au sérieux. Et puis croisez les doigts pour que tout va bien pendant notre démlnagement de Las Condes à Bellavista la semaine prochaine!

4 commentaires:

  1. J'ai lu tout ton blog, il est tres sympathique, humoristique et explique bien les petites choses différentes pour nous, européens.
    Je vais moi meme au Chili en aout pour plusieurs mois donc je t'encourage a continuer la rédaction de ce blog que je viendrais consulter le plus souvent possible.
    Bonne continuation

    Nicolas

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  2. Merci pour ton commentaire, Nicolas! Qc tu feras au Chili et ou exactement?

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  3. En fait je vais a Santiago en aout prochain jusqu'a environ mars-avril pour prendre des cours d'espagnol et pour rejoindre mon amie chilienne qui elle habite a Curico ( plus au Sud ).
    Je logerais sans doute au Barrio Brazil, que penses tu de ce quartier?
    Et toi que fais tu exactement au Chili?détente?découverte?
    En tout cas ton blog me donne envie de découvrir ce pays au plus vite... ; )

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  4. Cool! Apparement, le Barrion Brazil est très bien, ça bouge! Pour nous, c'était un epu loin pour le boulot et on n'a pas encore découvert ce bout de la ville, mais on dit que ça vaut le coup et ce n'est pas très touristique.
    De mon côté, j'accompagne mon Cosmonaute qui était muté ici, puis je travaille comme benevole (enfin, je commence en 2 semaines...), car mon visa ne me permet pas de travailler...

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