Au début du mois de septembre sur les carrefours de Santiago, les jongleurs, les artistes, les vendeurs de Super Ocho, les vendeurs des fruits, les vendeurs des journaux, les vendeurs de n'importe quoi et les mendiants qui ne vendent rien, ils voient arriver des vendeurs des drapeaux. Comme le mois de septembre, ce n'est même pas le mois de la rentrée, je me suis demandée pourquoi tout ces drapeaux. Bon, c'est vrai que le 18 septembre, c'est le jour d'indépendance, mais en France, est-ce que vous voyez les vendeurs des drapeaux depuis le début de juillet? Et vous en voyez, tout court? En Tchèquie, c'est pareil, pour nous, l'indépendance, c'est en fin octobre et la seule chose que vous entendez, c'est que les magasins avides de vos sous commencent à crier: Joyeux Noël, Joyeux Noël!
Mais au Chili, c'est vraiment dû à l'indépendance qui s'approche. Dans les jours suivants, dans les magasins, des panneaux qui vous font penser à commander des empanadas apparaissent. Puis vous entendez de temps en temps que les gens parlent des cadeaux pour les enfants et vous comprenez qu'il faut aussi faire un cadeau à votre femme de ménage, des concierges, des jardiniers et d'autres personnes qui s'occupent de bâtiment où vous vivez. Et une fois que vos collègues commencent à se plaindre qu'ils vont encore grossir, vous êtes surs que ces fêtes là, ça doit être aussi important que Noël. Au Chili, dans le pays où les magasins ne ferment pas que tard dans la nuit, où les restos ne ferment jamais, des petits pancartes vous disent: le 17 septembre, on ferme à onze heures du matin. A seize heures. Et selon la loi, au plus tard à dix-sept heures, mais à cette heure-ci, Santiago s'est déjà vidé et à la place de la pollution, il se couvre par un odeur de barbecue, asado, comme on dit ici. Pour moi, ça a voulu dire que j'ai encore travaillé jeudi matin, mais mon groupe des familles avec un malade Alzheimer, avec lesquelles je travaille jeudi après midi était déplacé pour mercredi. Jeudi après midi, je rentrais à la maison pour se reposer un peu avant la fête par des rues froides et désertiques de Santiago et le seul bruit que j'ai pu entendre, c'était le clapotement des drapeaux chiliens dans le vent.
Le vrai jour d'indépendance, c'était vendredi le dix-huit. On est allés faire un asado chez le chef du Cosmonaute. Le chef est français et grâce à ça, l'asado n'était pas tout à fait chilien: déjà, à la place des empanadas, on a mangé une pâté à l'aubergine, la viande a été bien saignante et pas trop cuit à la chilienne, et surtout, pas de drapeau sur la façade de la maison. Ce qui est même contre la loi. Si vous êtes étranger, vous avez le droit de mettre aussi votre drapeau, mais plus bas que le drapeau chilien.
Nous sommes rentrés trop tard pour sortir, mais samedi, on était decidés d'aller voir les festivités chiliens. On était au courrant que dans des parques de Santiago, ils s'y passent des choses, et finalement, nous avons donc decidés d'aller voir le parque Suarez chez nous à Providencia. Karen et Antoine sont allés la veille voir le Parque Padre Hurtado à la Reina, mais apparemment il y avait trop du monde, pas de place pour se garer et une file d'attendte énorme pour entrer. Vu que le Parque Suarez est bien plus petit, on a esperé de trouver une place pour nous. Il faisait très chaud et comme nous sommes arrivés vers une heure, on a pu entrer. Et à l'intérieur, il y avait des kiosques avec des trucs traditionnels et des trucs de la fait foraine, puis plein de gens avec des poussettes, des cages avec des animaux de la ferme, donc des autruches, des lamas, des poules et des lapins, une présentation des outils dont on se sert à la ferme, et puis, heureusement, des kiosques avec de la bouffe. On les a pris à l'attaque et on a vu que la bière est servie dans un goblet en plastique et les empanadas ressamblent étrangement aux empanadas dont on peut acheter au supermarché. En les mangeant, sur le podium, une petite competition en cueca était en train de se passer et Karen a dit que les danceurs dansent vraiment très mal. Tout cette fête à Providencia avait donc quelque chose de très artificiel et fake. Un peu bourrés par la bière bu au soleil, on a bien rigolé en observant un rodéo des enfants et des compétitions ou les parents ont lutté avec même plus d'enthousiasme que les enfants, mais après, on a décide d'aller voir un vrai rodéo ailleurs.
A Lo Barnechea. Je vous ai parlé beaucoup de ce quartier du luxe, mais je ne vous ai pas dit qu'il y a un part de Lo Barnechea, el pueblo, une colline où, bien coupés de tout ce luxe, vivent les gens plutôt pauvres, des gens qui ont vécu là bas encore avant que les riches ont décidé de construire des résidences dans les collines autour de Santiago. Même si el pueblo de Lo Barnechea semble être plus riche que les quartiers sud de Santiago, je suis sure qu'aucun Chilien parano y mettrait des pieds. Et comme les villageois, c'était des agriculteurs à la base, une arène fait partie du village. Et pendant les quatre jours de festivités, les rodéos y ont eu lieu.
Sans avoir un problème pour se garer, vu que la plupart des gens sont venus en transport en commun ou à pied, on est montés à pieds vers l'arène passant par un chemin poussiereux bordé par des kiosques. Les kiosques vendaient des mêmes sucettes, barbe à papa, pommes en caramel, des cacahuètes en sucre et des rouleaux avec du manjar, mais on avait un sentiment que cette fête est plus populaire et traditionnel que celui de Providencia. Déjà, pas d'entrée payée. Mais avant de continuer, je vais quand même vous avertir d'une chose. Le manjar. Car un visiteur inexpérimenté pourrait facilement le confondre avec de la nutela. Mais le manjar, la même chose comme la dulce de leche argentine, c'est du lait qui est cuit jusqu'à ce qu'il devient caramélisé, c'est à dire jusqu'à ce qu'il devient marron et caoutchouteux et met en extase des Chiliens. Je me suis fait avoir qu'une fois à Valparaiso où j'ai acheté des churros en pensant qu'ils sont farcis avec de la nutela. Puis, dès que le vendeur des churros m'ont quitté de regard, j'ai offert cette délicatesse aux chiens de la rue.
Mais continuons la montée vers l'arène. Sur des planches en bois, des villageois y étaient assis en regardant le premier tour de rodéo. Deux gars sur des cheveux, des huasos, ont poursuivi un toro et on n'a compris qu'il fallait coincer le toro de temps en temps contre la barrière de l'arène. Puis le voix du juge a dit deux mauvais points. Ou trois bons points. Et parfois aucun point. On a regardé et comme le parcours qu'il faut faire avec le toro est toujours le même, on a compris petit à petit d'où sort le toro, où il est censé de courir et où les huasos doivent le retourner et on a donc pu anticiper, avec un voix grave, les décisions du juge. Deux mauvais points quand les huasos étaient vraiment nuls et pas seulement qu'ils n'arrivaient pas coincer le toro contre le bord pour le retourner, mais en plus, le toro a trouvé une occasion de s'échapper complètement, un mauvais point si le toro a changé de sens car les huasos n'étaient pas capables de le maintenir dans le sens des aiguilles de la montre etc. Le public était plutôt calme et passait le temps à se gaver par des sucettes, des rouleaux au manjar et des cacahuètes. Ce n'était que les enfants qui s'excitaient au bord de l'arène. Les huasos discutaient calmement sur les performances de ses collègues et tout était couvert par la musique traditionnelle. Vaaamos bailar la cueeeca... Le supporteur le plus hystérique, c'était sans doutes un chien de la rue qui, appuyé contre le bord de l'arène, regardait partout, se deplaçait de temps en temps pour voir mieux et tout attentif, il n'a pas aboyé une seule fois. On dit que les chiens n'ont pas une vision très bonne, mais je ne le crois pas. Ce chien là, il a regardé tout le rodéo pendant des heures et ce n'était que pendant la pause qu'il s'est éloigné pour manger un peu de la délicieuse poubelle.
Une fois que la nuit est tombée sur Lo Barnechea, le dernier tout du rodéo s'est approché. Les cinq derniers couples des huasos se sont disputés la victoire. J'étais un peu déçu que juste avant, le couple formé par un père et son fils a était éliminé, car le fils, il n'avait même pas l'âge pour pouvoir conduire, mais, en galope sur son cheval, il a maitrisé le toro d'une façon dont jamais je maitriserait des pots de yaourt avec mon Pathfinder.
Une fois le rodéo terminé, Señorita Francisca, une fille indienne habillée dans une robe verte traditionnelle, dont l'élégance est tout à fait comparable aux robes traditionnelles de la Bolivie, a donné des médailles aux vainqueurs. Puis c'était le temps pour un peu plus de la musique traditionnelle ce qui a donné faim au Cosmonaute. On est allées donc gouter des empanadas et de choripan, des brochettes. Les empanadas étaient bonnes et le choripan excellent. Mais quand même, je me demande comment les Chiliens arrivent à se gaver par empanadas, des sucettes, des motte con huesillos (à vous de deviner qu'est-ce que c'est :-) ), de manjar et d'autres choses pareils. Il faut vraiment être patriote pour faire ça.
Ils vendaient le choripan près d'une tente où un groupe de la musique s'excitait sur le podium et les gens, aussi tout excités, ont dansé comme des fous. Le Cosmonaute a commencé de saturer un peu de folklore chilien et une fois qu'au podium vers l'arène, un groupe de la musique traditionnelle de la Patagonie s'est préparé pour jouer, on a décidé de battre en retrait. Chez nous, à Bellavista, au Patio de Bellavista, dans ce milieu stérile et touristique qui, ce samedi soir, était vide comme je l'ai jamais vu.
Dimanche, on a decidé qu'on a assez vu de patriotisme chilien, et on est allés faire une petite balade dans la montagne. On est monté le Pochoco, une colline derrière Lo Barnecheou. Par stratégie, on n'a pas voulu quitter Santiago dans un autre direction que vers la cordillère, car on savait que dimanche soir, notre ville se re-remplira des gens et que les bouchons à la périphérie seront monstrueux. La balade était tranquille et agréable et du sommet, on a pu faire un petit coucou à Plomo et voir qu'au sommet de Provincia, il n'y a quasiment plus de neige et qu'on pourra bientôt tenter d'y monter.
Et aujourd'hui, le printemps commence! Par la pluie, bien sur. D'ailleurs, c'est aussi la Journée internationale de la maladie d'Alzheimer. Du coup, avec l'assoc où je travaille, on a monté une petite stand devant la Moneda. On distribuait des flayers, donnait des petits ballons aux enfants et les mémés dans la direction d'association ont même invité un gars avec une orgue de Barbarie qui, en jouant en boucle un chanson, a découragé tout le public qui voulait s'approcher pour nous parler. Et ainsi, en écoutant ce chanson démentiel, on a sensibilisé les gens aux risques de la maladie.
Et pour que ça soit mois joyeux, le Cosmonaute part au Télescope ce vendredi.
La fin
Il y a 15 ans
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